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Petites chroniques d'ici et d'ailleurs

Odyssée d'instants précieux

Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !

Les monuments aux morts sont présents dans chaque commune française. Ils rendent hommage, depuis la Grande Guerre, à tous les hommes qui sont morts au combat, sur les champs de bataille. Pourquoi expliquer cela me direz-vous ? En effet, tout le monde sait ce qu'est un monument aux morts. Ce que je voudrais souligner, c'est que ces monuments sont dédiés aux hommes. Vous me voyez venir ? Non, je ne veux pas me lancer dans la défense de la reconnaissance de l'action des femmes pendant la guerre ! Non, je pensais plutôt aux animaux enrôlés pendant les guerres...

Il est connu que nos voisins outre-Manche ont un respect tout particulier pour les animaux. Et c'est ce qu'ils prouvent avec le monument dont j'ai choisi de vous parler : Animals in War Memorial. Et oui, ils ont osé ! Situé du côté est d'Hyde Park, en plein centre londonien, le monument a été inauguré en novembre 2004 en présence de Son Altesse Royale la princesse Anne.

Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !

Il s'agit de rendre hommage aux milliers d'animaux morts pour défendre "leur pays". On estime à plus de 8 millions le nombre de chevaux morts pendant la Première Guerre mondiale. En effet, on parle souvent de cette guerre comme de celle de la transition entre armes archaïques et modernes. Tandis que de nouvelles armes apparaissent, les anciennes armées sont encore présentes, du moins au début de de la guerre. On voit alors des cavaleries s'élancer au grand galop, dégainant l'épée sur des champs de batailles où leur font face ... les premiers chars blindés ! Pas très difficile d'imaginer l'issue de ces combats pour les cavaliers et leurs montures... Si les chevaux sont les plus connus des "armes" utilisées pendant les guerres, ils sont loin d'être les seuls animaux réquisitionnés. Il y a dans la même famille, les mules et mulets, mais aussi des chiens, des chats, bien sûr, des pigeons voyageurs, etc. Tous ces animaux, s'ils n'ont pas toujours été d'une très grande utilité dans les combats modernes, ont au moins eu ce mérite de réconforter les soldats, devenus de véritables mascottes, comme en témoignent différents clichés. Pourtant si la présence d'animaux sur les champs de bataille semblait déjà ridicule lors de la Première Guerre mondiale, elle sera renouvelée lors de la Seconde Guerre mondiale. Environ 14 millions d'animaux ont été réquisitionnés pour la Première Guerre, et ce sont environ 30 millions qui le seront pour la Seconde. Plusieurs affiches, datant pour la plupart de la Seconde Guerre mondiale, appellent aux dons pour l'aide vétérinaire des animaux envoyés sur le front. Outre les animaux européens, c'est aussi à tous ceux qui sont plus "exotiques", pour nous, que le monument rend hommage : éléphants ou encore chameaux ( à moins que ce ne soient des dromadaires ?) sont aussi représentés.

Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !
Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !
Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !
Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !
Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !

Revenons-en donc à notre monument. Réalisé par David Backhouse, le monument se détache en trois éléments. La partie principale, c'est ce mur en arc de cercle séparé en son centre. Du côté concave, est inscrit sur la droite, le nom du monument, "Animals in War" et sa signification "Ce monument est dédié à tous les animaux qui ont servi et sont morts aux côtés des forces britanniques et alliées dans les guerres et les campagnes à travers le temps.". A côté, cette phrase toute simple mais d'une grande force, "Ils n'avaient pas le choix". Sur la partie gauche, sont représentés en bas relief les différentes espèces d'animaux utilisés dans les guerres. De l'autre côté, sur la partie convexe, sont inscrits les noms des donateurs et de l'artiste.

Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !
Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !

Revenons à l'intérieur. Deux mulets en bronze s'avancent vers les marches et l'espace ouvert dans le mur. Ils sont chargés — sans mauvais jeu de mot — comme des mulets, transportant de l'artillerie. Placés au centre du demi-cercle comme dans une arène, ils évoquent bien sûr les conditions affreuses, le dur travail infligés aux bêtes ainsi que leur extrême vulnérabilité. L'apparence du bronze plutôt rugueux insiste sur le sentiment de dureté.

Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !
Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !

De l'autre côté du mur, toujours sur cette même ligne qui le traverse, et cette fois-ci posés sur le gazon, entre les arbres, deux autres animaux de bronze. En tête, un cheval marche. Son pas est assuré bien que sa tête soit baisée : il semble sorti de longues épreuves, mais ici le bronze est lisse, symbole que ces épreuves sont bien derrière. Un chien le suit. Lui regarde vers l'arrière — vers les deux mulets, vers le centre de l'arène. Il semble presque étonné d'être là, sorti indemne de l'Enfer. Le bronze de ses pattes est rugueux comme s'il était couvert de boue. Pourtant son dos est parfaitement lisse : on comprend qu'en continuant de suivre le cheval vers l'avant, il sera de plus en plus lisse, oubliant les horreurs de la guerre derrière lui. C'est donc bien le côté de l'espoir, d'un futur meilleur.

Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !
Monuments aux morts ... pour quatre pattes et deux ailes !

Si vous passez par Londres, allez donc jeter un coup d'oeil à ce très joli monument. Que vous aimiez passionnément les animaux ou non, cet endroit dégage une grande force. Ce n'est pas juste une plaque, ce n'est pas juste un obélisque marqué de quelques noms, ce n'est certainement pas une statue bien grillagée : c'est un monument qui invite le visiteur à participer. Non seulement les bronzes sont à taille réelle et d'un réalisme troublant, mais en plus, le visiteur qui fait un minimum attention au monument, ne peut résister à cet appel. En effet, le trottoir est situé du côté intérieur du monument, or tous les animaux — qu'il s'agisse des deux mulets ou des bas-reliefs — convergent dans un même mouvement vers le passage dans le mur. Le visiteur devançant le premier mulet, y passe alors à son tour sur les pas du chien et du cheval, qu'il découvre alors.

Bref, voilà un petit coin à voir ! Et pour plus d'infos sur le mémorial (et pour ceux qui se débrouillent un minimum en anglais) le site du monument : http://www.animalsinwar.org.uk/

Vous y trouverez notamment les histoires et photos de Simon le chat, de GI Joe le pigeon, de Rob le chien, ou encore d'Upstart le cheval de police. Tous ces animaux ont reçu la Dickin Medal, équivalent de la Victoria Cross pour les animaux. Si le symbole est beau, je ne suis pas sûre pour autant que cela change quelque chose pour ces pauvres bêtes...

Animals in War, Upper Brook Street, London, United Kingdom

Je signale, par ailleurs, que j'ai découvert ce monument bien avant de m'y rendre en faisant des recherches après avoir lu le roman Cheval de Guerre de Michael Morpurgo, adapté au cinéma en 2011 par Steven Spielberg. Le livre comme le film témoignent de la Première Guerre mondiale à travers le regard d'un cheval, Joey, tour à tour cheval de ferme, enrôlé dans la cavalerie, puis cheval de trait transportant l'artillerie. L'histoire, qu'elle soit celle du livre ou celle du film est d'une très grande sensibilité et un excellent moyen d'approcher la Grande Guerre que se soit sur le front ou à l'arrière, dans le camps allemand ou dans celui des Anglais et des Français. L'un des moments les plus marquants reste celui ou Joey, perdu sur le no man's land, empêtré dans les barbelés devient l'occasion d'un cessez-le-feu et du tête-à-tête invraisemblable entre un Allemand et un Anglais venus tous deux l'aider. Le passage est d'une force extrême, les deux soldats n'ayant aucun ressentiment l'un envers l'autre et comprenant bien qu'ils ne sont que les outils de machinations qui les dépassent. Joey, survivant improbable du no man's land, devient alors une convoitise, chaque camp espérant récupérer et soigner ce brin d'espoir, en faire sa mascotte. C'est finalement le hasard qui décidera du camp chargé des soins de ce formidable rescapé.

Encore une très belle histoire baignée de larmes pour ma part !

Je vous parlais de la cavalerie lancée face à l'artillerie lourde, en voilà l'exemple dans "Cheval de Guerre"Je vous parlais de la cavalerie lancée face à l'artillerie lourde, en voilà l'exemple dans "Cheval de Guerre"

Je vous parlais de la cavalerie lancée face à l'artillerie lourde, en voilà l'exemple dans "Cheval de Guerre"

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